samedi 27 octobre 2012

A l'occasion des cérémonies de la Toussaint

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Le deuil dans la tradition musulmane ( Al Houzn ou Al Hidad , en arabe )

Extraits du merveilleux ouvrage de l'islamologue Monqiue Reaerts: La Mort, rites et valeurs dans l'islam maghrébin.

Disponible auprès de votre blog Bruxellois, surement 



Selon les prescriptions islamiques, la période de deuil pour un décès est strictement limitée aux trois jours suivant l'enterrement, exceptée pour la veuve. 

Période durant laquelle, proches et amis viennent rendre visite à la famille du disparu, offrent des prières à sa mémoire et prononcent des paroles de condoléances.

Dans la tradition arabo-musulmane, le chiffre trois, comme d'ailleurs dans bien d'autres cultures, est perçu comme un nombre achevé, total.

Dans la réalité des faits, la période de deuil observée est bien plus longue et s'étend presque partout, jusqu'au quarantième jour, ponctuée selon les coutumes locales, par des cérémonies au troisième et parfois au septième jour.

Durant la période de deuil et surtout durant les trois premiers jours, la maison mortuaire devient un lieu ouvert vers l'extérieur. 

Les allées et venues sont nombreuses et la coutume veut que les connaissances et parents du défunt, venus de loin, passent au moins une nuit, dans la demeure du défunt.

A la différence des autres manifestations jalonnant la vie familiale, aucune invitation n'est faite. 

On avertit simplement du décès et tout un chacun est bienvenu, même celui qui était en dispute avec le mort ou avec sa famille.

Tous ceux qui viennent partager la douleur de la proche famille du disparu, sont tenus de partager au moins un repas.

Il s'agit d'une Sadaqa (aumône) pour le mort. Celle ci se compose habituellement de couscous et de viande mais les variantes régionales sont nombreuses. 

On croit que la nourriture consommée au profit du défunt est censée enlever de sa bouche, la terre qui aurait pu s'y introduire malgré les précautions de l'ensevelissement et restituer au mort la pureté sans laquelle il peut aborder l'au-delà.

Selon certaines interprétations religieuses, celui qui a omis de stipuler dans son testament qu'il voulait offrir une Sadaqa après sa mort et qui n'a pas fait l'énumération des quantités de nourriture, nécessaires à la préparation du repas, n y a, en principe, pas droit.

Les biens qu'il a laissés après sa mort ne lui appartiennent plus et les héritiers sont libres d'en disposer à leur guise.

Quoique la famille ne soit tenue par aucune obligation, il y va de son honneur d'offrir une Sadaqa 

A l'origine, la Sadaqa est une distribution de nourriture faite aux pauvres, mais pratiquement il s'agit d'un repas communiel auquel participe la communauté entière.

Il n'est pas rare qu'une famille s'endette afin que les funérailles soient dignes et conformes au prestige du groupe qu'elle représente.

La période de deuil n'est donc pas seulement celle de l'entourage du mort qui pleure sa disparition et lui rend un dernier hommage, c'est aussi l'occasion de grandes dépenses, d'autant plus élevées que la personne a joui d'un statut important de son vivant, par exemple l'aîné d'un lignage.  

Les enfants du mort doivent alors puiser dans les réserves alimentaires s'il y en a et égorger de nombreux moutons, aliénant ainsi une part non négligeable de leur héritage.

La période de deuil et les dépenses funéraires, consacrent le " nom " (ism) et le poids du prestige (thaql) de ce "grand". 

Les dépenses rituelles qui ont une fâcheuse tendance à s'accroître de manière effrénée, renforcent la solidarité du groupe et donnent l'impression d'un plus grand respect des traditions alors que l'ostentation qui accompagne les rites religieux est unanimement condamné par les prescriptions canoniques en tant que Bid3a, c'est à dire en tant que déviance répréhensible du point de vue de l'orthodoxie musulmane.

,(...). A Moulay Driss Zerhoun, près de Fes, le premier repas est servi après la sortie du défunt, à toutes les personnes venues consoler la famille. 

Il consiste en du beurre et du miel mélangés.
Les moins riches donnent du pain et des figues sèches.

Une série d'autres coutumes observées par les habitants de Fes, ont été signalées par Westermack et semblent encore en usage dans quelques familles. 

Ainsi, les gens ne doivent pas boire de l'eau dans des bols ordinaires mais dans de la vaisselle de terre, décorée au goudron spécialement achetée à cet usage.

Après avoir mangé le pain et le miel, ils ne doivent pas se laver les mains mais les essuyer à des serviettes blanches.

Chaque visiteur aura apporté la sienne.

Le soir de l'enterrement, les étrangères et toutes les femmes de la famille qui ne peuvent observer la retraite des trois jours ( telt ayyam), doivent rentrer chez elles. 

Elles peuvent, si elles veulent, revenir le lendemain dans la journée rendre une petite visite à la famille mais pas passer la nuit chez elle.

(...) A Tanger, le repas est porté le matin au cimetière par les hommes de la famille et il est consommé principalement par les tolbas ( assistants du maître coranique ). 

Cette coutume semble se perdre peu à peu. Le jour même, mais plus tard dans la journée, les femmes se rendent aussi au cimetière avec des offrandes.

Il s'agit principalement de pain non levé et de figues sèches qui seront abandonnés sur place et qui seront récupérés par les pauvres et les enfants

Pendant la période des quarante jours de deuil, les femmes n'iront pas aux fêtes et ne mettront pas le henné.

Chez les Bni Touzine (Rif), toutes les femmes du village s'abstiennent de mettre du henné.

Selon Servier, dans les villages et les campagnes kabyles, les hommes ne se raseraient pas non plus, et comme les femmes, ne tailleraient pas leurs ongles, observant par là, un interdit de deuil commun à tous les peuples sémitiques. 

Et qui sont les interdits de la saison des labours, pendant les quarante jours de la germination.

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