...je n'adhère pas à Charlie, en tant que magazine...Et c'est mon droit
Je fus, dès l’annonce de la boucherie terroriste commise dans les locaux de Charlie Hebdo, l'un de ces millions de citoyens attachés viscéralement à la liberté de la presse et de la création artistique, à crier ma révolte et mon indignation, contre ce crime innommable et abject.
J’ai, sans réserve aucune, tenu à me solidariser avec les dessinateurs rescapés de ce magazine, et à dénoncer avec vigueur, la tuerie criminelle commise à l’encontre de ceux qui furent victimes de ce lâche forfait.
En cela, je suis et resterai Charlie et n’hésiterai pas à m’afficher comme tel.
En revanche et sur un plan strictement artistique et intellectuel, je dois avouer que ce magazine, auquel j'étais abonné il y a quelques années, a cessé de de m'accrocher.
Et pourtant, je suis depuis ma tendre jeunesse, un fervent lecteur de la littérature émargeant à ce rayon.
A mes 18 ans déjà (j’en suis à ma 64 ème année), j’accrochai rapidement Pilote, qui devint très tôt une de mes lectures de chevet.
J’ai suivi l’évolution de ce magazine jusqu’à sa fusion, intervenue vers le milieu des années 80, avec Charlie mensuel.
Pilote m’avait initié à l’humour féroce et avant gardiste et m’avait orienté vers cette littérature, contestatrice d’un système de valeurs, largement remis en question par la jeunesse d’alors.
Parallèlement à mon engouement pour Pilote, je fis la connaissance d’Hara Kiri, crée par François Cavanna.
Dans la foulée, je ne ratais que rarement les sorties de l’Echo des Savanes, Fluide Glacial ou encore Métal hurlant.
Les dessins de Brétecher, Lauzier et autres Cabu prirent également une place importante dans mon intérêt pour la BD contestatrice.
De ce que j’ai pu relever ces dernières années, et surtout depuis l’arrivée de Philippe Val, à la tête de Charlie Hebdo, cette publication, a pris un virage particulier
En ce sens que la critique des religions occupe une place de plus en plus prépondérante, voire obsessionnelle et couvre des espaces non négligeables dans la production des dessinateurs du magazine.
C’est le choix de la rédaction du magazine et il faut le respecter.
En revanche, cette nouvelle orientation s’est accompagnée, dans le chef de la direction de ce magazine, d’une tendance au refus de la critique et d’une sorte d’intolérance frisant avec un totalitarisme malvenu de la part d’un magazine, prônant plus que d'autres, une liberté très poussée de la parole.
L’épisode du licenciement peu cavalier – et c’est peu dire – de Siné, ce dessinateur de talent, ayant depuis de longues années produit pour Charlie Hebdo, dénota le caractère peu ouvert de cette direction, sur ce qui ne collait pas à sa vision de la « critique »
L'affaire Siné - Val
Le 2 juillet 2008, Siné avait rédigé une chronique dans Charlie Hebdo dans laquelle on trouvait une réflexion sur Jean Sarkozy, un des fils de la lignée De Nagy Bocsa
« Il vient, écrivait Siné au sujet du fils Sarkozy, de déclarer vouloir se convertir au judaïsme avant d’épouser sa fiancée, juive, et héritière des fondateurs de Darty. Il fera du chemin dans la vie, ce petit ! »
Pour cette ironie, Siné apprit en ouvrant l’hebdomadaire du 16 juillet 2008 qu’il était licencié, soit environ deux semaines plus tard.
Lorsque l’on sait que l’instigateur de ce renvoi n’est autre que Philippe Val, devenu peu après directeur à France Inter, nommé par… Nicolas Sarkozy, lui-même père de la jeune "victime"....
La raison invoquée par Philippe Val pour justifier ce licenciement est la suivante :
selon lui, les propos de Siné « pouvaient être interprétés comme faisant le lien entre la conversion au judaïsme et la réussite sociale, et ce n’était ni acceptable ni défendable devant un tribunal ».
Quelques temps plus tard, Siné assigna Charlie Hebdo en justice pour « rupture abusive de contrat ».
Le jugement fut rendu le 30 novembre 2008 et le tribunal donna raison à Siné, invoquant le fait qu’« il ne peut être prétendu que les termes de la chronique de Maurice Sinet sont antisémites, ni que celui-ci a commis une faute en les écrivant » et également qu’« il ne pouvait être demandé à Siné de signer et faire paraître une lettre d’excuse ».
Charlie Hebdo fut condamné à verser 20 000 euros au dessinateur pour « préjudice moral » au motif que « la médiatisation de la rupture et le caractère humiliant de son annonce apprise en même temps que les lecteurs par la UNE du magazine (publication du numéro du 16 juillet 2008), ont causé à Siné un préjudice moral qu’il convient d’indemniser en lui allouant la somme de 20 000 euros ».
Toujours au sujet du
licenciement de Siné et du caractère « autoritaire et tranché» de Philippe
Val, Wiképédia rapporte ce qui suit :
Ses détracteurs relèvent notamment ses méthodes contestées au sein de la rédaction, mises au jour parfois par plusieurs cas d'opposition ou de démission (Philippe Corcuff, Olivier Cyran, Lefred-Thouron…), voire de licenciements (par exemple la collaboratrice du Monde diplomatique Mona Chollet)
Le 15 juillet 2008 il licencie de l'hebdomadaire, le caricaturiste Siné, qu'il accuse d'avoir tenu des propos antisémites sur Jean Sarkozy dans les pages mêmes du journal deux semaines plus tôt.
Le 2 juillet, commentant sur son ton satirique une déclaration de Patrick Gaubert, président de la Licra parue dans Libération, Siné, qui « sème la zone » (titre de sa chronique), avait écrit à propos du fils Sarkozy :
« Jean Sarkozy vient de déclarer vouloir se convertir au judaïsme avant d’épouser sa fiancée juive et héritière des fondateurs Darty. […] Il fera du chemin dans la vie, ce petit ! »
Pour justifier sa décision, Val avance la menace d'un procès de la famille Darty, écrivant qu'il aurait refusé, si le procès avait bien eu lieu, d'assurer sa défense et qu'il a avant tout cherché à éviter une éventuelle condamnation du journal pour antisémitisme.
L'avocate Gisèle Halimi, pour sa part, dénonce ce dernier argument comme étant de mauvaise foi, car elle estime qu'un procès de ce genre aurait facilement été gagné par l'hebdomadaire.
Charb (ndlr: directeur de la publication, assassiné par des terroristes islamistes) ajoute : « Une phrase, dans une chronique pouvait être mal interprétée par des gens de bonne foi (quelques-uns) et instrumentalisée par des gens de mauvaise foi (plus nombreux) ».
Ce licenciement, intervenant trois semaines après une polémique entre Siné, Polac et Val au sujet de l'affaire Clearstream et du journaliste Denis Robert, occasionne les vives protestations de nombreuses personnalités d'horizons très variés, comme les dessinateurs Plantu28, Philippe Geluck, Jihel, Willem, Vuillemin ou Tignous, lesquels mettent en cause Val au-delà de sa décision.
Dans une interview au Nouvelobs, Siné accuse Val de l'avoir licencié non pas pour cette chronique, qui ne serait, selon lui, qu'un prétexte, mais en raison de leur désaccord au sujet de l'affaire Clearstream et du journaliste Denis Robert, une thèse réfutée par Val, mais aussi par Charb et Cavanna.
Des personnalités historiques du journal, anciens collaborateurs ou qui avaient pris part à sa refondation en 1992, telles Gisèle Halimi ou Delfeil de Ton, parlent de « procès en sorcellerie » ou de « calomnie ».
Val reçoit, de son côté, le soutien d'éditorialistes tant du Figaro que de Libération, de Bernard-Henri Lévy ou de la ministre Christine Albanel, ainsi que celui de différentes associations comme la Licra, le Crif ou l'UEJF.
En revanche Willem, Delfeil de Ton (autre fondateur du journal), Carali, Barbe, Geluck, Malingrey, Pichon, Pétillon, Got, Faujour, Picha, Tignous, Thouron, Tardi, Wiaz ou encore Michel Polac défendent Siné.
Cavanna, autre membre historique de Charlie Hebdo, estime que « ni l’un ni l’autre n’a démérité », parlant d'une « erreur d’appréciation de Val » au sujet d'une « plaisanterie, certes dangereuse mais occasionnelle » de Siné; à son avis, c'est « une gaminerie, une bouffée de panique. Pas de quoi fouetter un chat »
JE SUIS SOLIDAIRE DE CHARLIE LORSQUE JE DENONCE L'INTOLERANCE DES ASSASSINS ISLAMISTES, MAIS JE TIENS A CONSERVER MON DROIT A L'APPRECIATION DU TRAVAIL ET DES IDEES PROMUS PAR CE MAGAZINE
CAR JE CONSIDERE QUE COMME TOUTE ENTREPRISE FONDEE ET GEREE PAR DES HUMAINS, CETTE PUBLICATION NE DOIT PAS ETRE A L'ABRI DE L'EVALUATION ET DE LA CRITIQUE.
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